Retour sur les tables rondes « Production » et « Diffusion » organisées à l’occasion de la manifestation Le Jour le plus Court 2015

À l’occasion de l’édition 2015 de la manifestation Le Jour le plus Court, proposée par l’Agence du court métrage du 18 au 20 décembre 2015, le Carreau du Temple (Paris 3ème) a accueilli une journée professionnelle dédiée au thème « Consolider la production et améliorer la diffusion du court métrage ».

Les Effeuilleurs ont suivi les tables rondes et rencontré divers acteurs du secteur cinématographique. L’occasion de mieux connaître leurs regards sur la production et la diffusion du court métrage en France, et notamment leurs rapports aux chaînes de télévision, financeurs et diffuseurs du court métrage.

Anne Bennet a été productrice de courts métrages, notamment d’ Ominubus de Sam Karmann, palme d’or en 1992 et oscar du meilleur court métrage en 1993. Elle dirige actuellement un bureau de tutelle financière au ministère de l’Enseignement Supérieur.

Cette journée de rencontres professionnelles organisée à l’initiative du ROC (Regroupement des Organisations du Court), coprésidé par Ludovic Henry, s’est articulée autour des axes abordés dans le rapport d’Anne Bennet « Pistes de réflexion pour consolider la production et améliorer la diffusion du court métrage » paru en novembre 2015. Commandité par le CNC (Centre National du Cinéma et de l’Image Animée) en janvier dernier, le rapport propose une approche et des solutions aux problématiques suivantes :

  • « le renforcement des capacités de financement privé du secteur, d’une part par les diffuseurs télévisuels historiques, et, d’autre part, en explorant de nouvelles opportunités et potentialités (médias numériques, financements participatifs, mécénat et débouchés à l’international) ».
  • « l’amélioration des conditions de diffusion en salle et à la télévision »[1].

Les acteurs du secteur se sont donc questionnés sur la possibilité de nouveaux modèles de financement et de diffusion du court métrage. Ce genre connaît actuellement une vie dynamique au travers de nombreux festivals organisés sur le territoire français, comme l’illustre Le Jour le plus Court. Cependant ce format cinématographique, indispensable aux auteurs afin de débuter et de se faire remarquer par des producteurs, ou même de trouver un terrain d’expression différent et plus libre que le long métrage, semble menacé par un manque d’investissements financiers et de reconnaissance. Ce phénomène se manifeste notamment par un manque d’intérêt de la part de la presse face au long métrage, comme l’a exprimé Jérémie Couston, journaliste cinéma à Télérama.

Hypothèse explorée à l’occasion de ces rencontres. Le modèle du mécénat développé dans le secteur privé pour l’art contemporain ou le spectacle vivant, qu’a présenté Christelle Lheureux au travers de son expérience d’artiste et de réalisatrice, pourrait intervenir aux côtés des subventions publiques et des investissements des chaînes de télévision (seconds financeurs du court métrage en France). Cependant le secteur semble manquer d’un atout qu’ont l’art contemporain et spectacle : celui de proposer un retour sur investissement rapide. Le cinéma , dont les modes de production et réalisation sont étalés dans le temps, pourrait être le lieu de contreparties nouvelles dans l’intérêt des mécènes privés. L’idée d’un « tourisme cinématographique », qui consiste à amener les investisseurs sur les tournages des films financés a déjà été expérimentée par de jeunes entrepreneurs tels Sébastien Aubert, producteur et directeur de Adastra Film présent à la table ronde « production ».

A l’issu des rencontres, Anne Bennet a présenté les recommandations développées dans son rapport.

Le secteur de la production pourrait, selon elle, connaître un soutien nouveau grâce à la création d’un fond de dotation du court métrage, sujet débattu au cours de la rencontre « Comment développer le mécénat dans le secteur du court métrage » au cours de laquelle des projets innovants tels que la plateforme de mécénat participatif proarti.fr ont été présentés au public.

L’auteure du rapport propose une valorisation du court métrage en accordant systématiquement aux films courts un label Art et Essai et en créant un système de déclaration de toutes les diffusions des courts métrages faites par les exploitants de salle de cinéma. Ceci afin de connaître le dynamisme réel du secteur et de le valoriser, pratique qui n’est aujourd’hui pas encore acquise par tous les professionnels de l’exploitation alors même qu’il est imposé par le CNC. Cette question a été soulevée lors de seconde table ronde, intitulée « Pour une diffusion plus large du court métrage en salle : le rôle des professionnels, de la presse et des pouvoirs publics ». La mise en place d’une étude relatant les pratiques de diffusion sur l’ensemble des salles françaises est une autre recommandation, ainsi qu’un modèle expérimental qui proposerait dans les salles volontaires la diffusion de courts métrages lors d’avant-premières. Finalement, la numérisation de l’ensemble du catalogue de 10 000 films que détient L’Agence du court métrage pourrait permettre, selon Anne Bennet, une diffusion plus étendue des films au sein d’un parc de salles françaises qui a vu sa numérisation commencer en 2010, à l’initiative du CNC, et qui est aujourd’hui quasiment achevée.

Angèle Perrottet - Étudiante C3M 2015-2016