Sébastien Rouichi-Gallot, fondateur et PDG de l’agence Citizens : « Le podcast est devenu l’un des piliers du fonctionnement des médias traditionnels »

Sébastien Rouichi-Gallot, fondateur et PDG de l’agence Citizens, accompagne les marques – de l’ONG à la multinationale- dans leur communication. Selon lui, le développement du podcast rappelle la floraison des radios pirates dès les années 1960, et il nous explique pourquoi les marques voient dans ce nouveau format sonore un levier de développement majeur, dans le but de toucher de nouveaux publics. Éclairage sur la façon dont les marques sont en train de s’approprier le podcast.

Effeuillage. – Quel rapport entretenez-vous aux médias dans votre activité professionnelle ?

Sébastien Rouichi-Gallot – Petit, comme beaucoup de futurs communicants, je voulais être journaliste. J’ai basculé du côté obscur de la force ! Passionné par cette force de prescription et d’opinion qu’offre le cinquième pouvoir, bien que souvent critiqué, j’ai rapidement bifurqué vers les relations média après une année de préparation d’Officier dans la Marine nationale à la fin de mes études supérieures.
Les relations média sont toujours au cœur des expertises de Citizens, même si nous élargissons notre champ d’action.

Comment en êtes-vous venu à vous intéresser au podcast ?

Chez Citizens, nous avons très tôt compris l’intérêt des podcasts dans le cadre des relations publiques. Nous travaillons avec la junior entreprise de Sciences Po Paris qui a qualifié pour nous, et en exclusivité, la toute première base de données des podcasts les plus influents en français et en anglais. Elle a mis au point une méthodologie propre, qui a été difficile et longue à définir, tant les indicateurs sont de sources disparates et souvent non vérifiées.

Quelles qualités attribuez-vous au podcast ?

Fondés sur des technologies depuis longtemps démocratisées et accessibles, les podcasts sont devenus en l’espace de quelques années un support médiatique incontournable. Flexibles et pour tous les goûts, les podcasts ne sont pas sans rappeler les radios-pirates, qui, déjà, en leur temps, donnaient le micro à des particuliers souhaitant partager leurs expériences et leurs goûts musicaux. C’est un univers horizontal : tout le monde peut créer son podcast selon ses envies, avec peu de moyens dans son salon. Le format s’est affirmé et professionnalisé jusqu’à devenir le cœur même des stratégies de développement de nombreux médias et de la communication d’un nombre croissant d’entreprises.
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On constate que les marques se sont massivement approprié le format podcast, à des fins commerciales. Comment l’expliquez-vous ?

Tout le monde peut mettre au point un podcast qui lui ressemble. La flexibilité et la simplicité du format expliquent la volonté des marques de se l’approprier également. J’y vois d’abord une opportunité pour elles, une discussion audio et sans image permet d’établir un nouveau lien avec les publics, avec un contenu nouveau. Le podcast permet d’instiller de l’humour, de la proximité, de la poésie, un ton décalé et même de l’espièglerie dans le lien avec les publics, des éléments qui sont parfois délicats à intégrer dans la communication plus « classique ».

Beaucoup de marques prennent ainsi de la hauteur grâce à leurs podcasts, tout en développant leurs univers : on passe dans l’envers du décor, on rencontre les collaborateurs, on explore les problématiques liées au secteur concerné… C’est l’occasion de faire vivre une marque dans son écosystème, mais de manière non commerciale. C’est un procédé intelligent. Je constate qu’au-delà des marques, d’autres acteurs s’y sont mis pour les mêmes raisons : les institutions, les politiques, les laboratoires de recherche…

Quels sont les atouts du podcast pour une marque ?

Malgré son jeune âge, le format est parvenu à s’imposer et à donner son propre rythme à bon nombre d’acteurs médiatiques pourtant implantés depuis des décennies. Les radios privées, en perte de vitesse depuis maintenant plusieurs décennies, mais également les chaînes de télévisions, ont cherché à s’adapter aux nouveaux appétits des audiences. Ainsi, le podcast est devenu l’un des piliers du fonctionnement des médias traditionnels. Les émissions de toutes les grandes chaînes sont à retrouver en replay sur leur site internet, ou sur les plateformes de streaming telles que Spotify ou ITunes.

Le podcast permet également de fournir une information d’une excellente qualité. Contrairement à certains médias attisant parfois le conflit, le podcast repose sur un rythme lent, en dehors de l’actualité à chaud. Avec le podcast, un microphone et une voix charismatique suffisent à transmettre du contenu qualitatif et par lequel demeure un dialogue serein.

En dépit de leur institutionnalisation et de l’intérêt croissant que leur portent les médias traditionnels, les podcasts resteront un média accessible à tous, à chaque citoyen souhaitant une estrade depuis laquelle partager ses pensées et échanger avec les autres, offrant ainsi un mode d’expression pluraliste.

Quel avenir entrevoyez-vous pour cette collaboration entre marques et podcast ?

Attirées par l’intimité qu’offre la voix, les marques s’emparent toujours plus de ce nouvel outil afin d’exposer leur vision. Les podcasts permettent de créer un lien entre les entreprises et leurs clientèles qui peuvent ainsi mieux comprendre leurs démarches et raison d’exister. Ils permettent d’établir un rapport direct entre les dirigeants et porte-paroles d’une entreprise, et une audience attentive et intéressée. La proximité et l’authenticité qu’offre le format oral des podcasts facilitent le développement d’une relation plus intime, marquée par l’émotion et la confiance. De la Maison Dior à Sephora, en passant par Microsoft ou McDonald’s, jamais les marques n’ont autant investi le royaume de la voix.

Propos recueillis par Joséphine Legrand - ÉTUDIANTE DU M2 MÉDIAS ET MANAGEMENT - CELSA

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