Le replay en mode accéléré

D’abord relégué au rang de pratique marginale, le comportement de consommation dit replay devient de plus en plus mainstream. Les Effeuilleurs zooment sur cette pratique avec Audienceslemag.

Car oui, les téléspectateurs sont maintenant plus de 4 millions à regarder les programmes TV en rattrapage. De plus en plus nombreux, ils y consacrent plus de temps. Les nouveaux adeptes sont surtout des moins de 50 ans, des actifs, des CSP+. Nous pouvons donc nous poser la question : jusqu’à quel point la consommation télé change-t-elle ?

Qui aurait pu imaginer, quand la télévision a pris son envol, qu’il serait un jour possible de rattraper un programme manqué sans quitter son fauteuil ? C’était impensable, la télécommande n’existait même pas ! Aujourd’hui, la télé que je veux, quand je veux, où je veux est devenue monnaie courante.
Cette évolution culturelle surfe sur la diversification des modes de réception des programmes dans les foyers, décrypte Jean-Pierre Panzani, du département Télévision chez Médiamétrie. La réception par ADSL/fibre a servi d’accélérateur,elle équipe 45,6% des foyers, trois fois plus qu’en 2009.

Le téléviseur, premier écran du replay

Les services de replay ont su simplifier la vie des téléspectateurs. « Toutes les générations peuvent y accéder, explique Jean-Pierre Panzani. Le téléspectateur n’est plus dépendant du temps du direct. Aujourd’hui, le téléviseur est devenu le premier écran pour regarder la télévision en rattrapage ; pendant plusieurs années, l’écran de la catch-up a été l’ordinateur ».

La quasi-totalité des chaînes de TV proposent un service replay. Une avalanche de contenus à rattraper : les chaînes historiques proposent en replay 92% de leurs programmes diffusés entre 17 heures et minuit (source CNC). Le programme en catch-up génère des recettes publicitaires de 90 millions d’euros. Pour mémoire, celui du média TV au global est de 3,2 milliards d’euros (source IREP).

On dénombre désormais au total 4,4 millions d’individus de 15 ans et plus qui, chaque jour, regardent un programme en catch-up (octobre-décembre 2015), et cela quel que soit l’écran (téléviseur, ordinateur, tablette ou smartphone). La télé de rattrapage ne cesse d’élargir son public : elle a doublé son auditoire en un an. On compte en moyenne chaque jour 2,6 millions d’individus qui rattrapent un programme sur leur téléviseur et 2,1 millions sur leur ordinateur, leur tablette ou leur smartphone.


L’audience en replay sur tous les écrans : 1h35 par jour

Le replay fédère chaque jour 4,4 millions de personnes qui y consacrent 1h35 (Durée d’écoute par Téléspectateur) par jour sur tous les écrans. Sur le téléviseur, 3,6 millions de personnes y consacrent en moyenne 1h38 par jour. L’audience délinéarisée (replay + différé par enregistrement) a une DEI de 11 minutes à comparer aux 3h43 de consommation moyenne du live (janvier-avril 2016). Ces pratiques contribuent à l’augmentation de la durée d’écoute de la TV : la durée d’écoute individuelle du média TV en mode délinéaire a gagné 3 minutes en une année.



Le replay séduit surtout les -50 ans, les actifs et les CSP+

Les habitudes des téléspectateurs évoluent donc, mais selon des rythmes différents. Les jeunes générations maîtrisent mieux la technique que leurs aînés et regardent moins la télé en live qu’eux. Les moins de 50 ans représentent 60% de l’auditoire du replay, contre quatre sur dix pour le live.
Au global, le public du rattrapage a en moyenne 38,8 ans contre 43,2 ans pour le public du live.

Autre marqueur du public du replay, l’activité professionnelle. Près de 58% de son public sont des actifs contre 45% pour le live. Ils travaillent, ils bougent plus, ils manquent de temps et ont moins l’occasion d’être à l’heure ou même présents quand le programme commence en live : ils peuvent désormais le rattraper. Le phénomène est identique chez les CSP+ : les catégories socio-professionnelles supérieures représentent près de 30% du public du replay rattrapage alors qu’ils ne représentent que 20 % du public « live ».


Le replay, essentiellement en prime time

Au niveau des contenus, ce sont ceux diffusés en live en prime time qui ont la part belle en replay. Plus de la moitié du rattrapage (52,4%) provient d’un programme diffusé entre 21 et 23 heures.

Et quels jours les fans de catch-up choisissent-il pour rattraper leur programme ? Surtout le week-end, disponibilité oblige là encore, le dimanche de préférence au samedi (7mn30 contre près de 6mn).


La fiction championne du rattrapage

Reste à savoir les genres de programmes préférés ? Les fictions – séries et téléfilms – caracolent, l’addiction est phénoménale. Ce genre de programme va jusqu’à mobiliser la moitié (50,7%) du temps passé chez les amateurs de catch-up. Les scores d’audience du replay décollent d’autant plus quand le programme a réalisé de bons résultats en live. « Le secret d’Elise » sur TF1 a été suivi en rattrapage par 1,2 million de téléspectateurs. « Trapped» sur France 2 par 747 000 fans, « Plus Belle la vie » sur France 3 par 542 000 et « X-Files Aux frontières du réel / la vérité est ailleurs – 1ère partie » sur M6 par 561 000 téléspectateurs. Sur Arte, la série «Jordskott la forêt des disparus / épisode III » a rassemblé 156 000 téléspectateurs en replay. Les contenus challengers les plus performants en rattrapage sont les jeux-divertissements à suspense comme « The Voice », « Danse avec les stars », « Nouvelle Star » ou encore « Koh Lanta » : ils constituent 15,7% des contenus suivis en replay. Performant, certes, mais loin de la fiction championne.

Marc Pellerin pour Audienceslemag