Le Jour le plus Court, vendredi 19 décembre 2015, Carreau du Temple, Paris 3e
À l’occasion de la table ronde dédiée à la production du court métrage, Effeuillage a choisi d’interroger Christelle Lheureux, artiste, scénariste et réalisatrice. Ses différentes approches du court métrage, parfois œuvre audiovisuelle, parfois œuvre d’art contemporain, lui permettent d’expérimenter les diverses voies de production et de diffusion proposée à ce format en France.
Effeuillage : Vous travaillez avec divers musées et institutions culturelles, certaines de vos œuvres sont présentes dans des fonds d’art contemporain, votre travail est aussi présent dans plusieurs festivals. Est-ce que vos films sont aussi diffusés à la télévision ou en salle de cinéma ?
Christelle Lheureux : Cela dépend. J’ai une pratique d’artiste, donc quand j’ai produit des pièces qui étaient plutôt prévues pour la salle d’exposition ou pour des biennales, je n’appelle pas ça des courts métrages mais plutôt des œuvres. Dans ce cadre j’ai vendu des pièces à des collectionneurs, à des institutions, à des fonds comme celui de Beaubourg, des FNAC (Fond National d’Art Contemporain) … Dans ce cas, ceux qui ont acquis les pièces sont libres de les montrer où ils veulent. Mais cela reste dans le cadre de l’art contemporain, c’est l’objet qui est vendu en plus de son mode de monstration.
Et puis il y a les films qui sont plus faits pour la salle. J’ai beaucoup montré mes films dans des festivals. Mon dernier film qui est un moyen métrage, qui s’appelle La terre penche et qui fait 53 minutes, est coproduit par Arte, il a été préacheté avant le tournage, il va y avoir une diffusion sur la chaîne en 2016.
J’ai déjà vendu une pièce d’art contemporain à Arte, que j’avais réalisée pour un espace muséal, il y a une dizaine d’année, car c’était un objet monobande avec un seul écran. Dans ce cadre j’ai été rémunérée en droit de diffusion.
Nous voyons beaucoup les films et les pièces d’art contemporain sur Internet aujourd’hui. Je suis en train de prévoir une monographie, un livre sur mon travail d’artiste et je suis aussi en train de mettre en ligne mes vidéos d’artiste sur la plateforme ViméoPro où les gens pourront se rendre une fois qu’ils auront le livre. Moyennant quelques euros ils pourront visionner, voire conserver le fichier.
E : Quel mode de diffusion préférez-vous ou privilégiez-vous ? Le fait du rapport physique avec le spectateur dans un musée change-t-il quelque chose pour vous par rapport à du préachat pour la télévision où vous n’avez pas de contact du tout avec un public ?
C.L : Je fais des œuvres pour l’espace dans lequel je vais les montrer au départ, toujours. Une vidéo que je réalise pour un musée, je sais que les gens ne vont pas arriver au début, ils arrivent au milieu, ils vont voir un petit morceau ou alors rester jusqu’à la fin pour voir le début et compléter. Dans ce cadre-là je fais moins des pièces narratives avec un début et une fin parce que je m’adresse à un spectateur plutôt déambulant qui va regarder la pièce comme on va regarder un tableau, mais le temps qui va lui convenir et ça je ne le connais pas par avance. Si j’ai envie de raconter une histoire et que je tiens à ce que le public voie le film du début à la fin, je réalise un film pour la salle de cinéma ou pour la télévision. Il faut y penser dès le départ, sinon c’est un peu mentir au public.
La meilleure expérience que j’ai, lorsque que je veux avoir un retour du public, c’est dans les festivals où on m’invite pour présenter mes films. Il y a toujours une discussion avec le public après la projection, ce qui est le meilleur moyen d’être dans la salle quand le public regarde le film, d’écouter les questions et d’être dans le dialogue avec les spectateurs.
Les expositions muséales ne durent que deux mois, on ne peut pas y être tous les jours, donc c’est plutôt pendant les vernissages que les gens nous font des retours mais c’est un public très précis.