Diffusion des films transgenre au cinéma en France : état des lieux et évolution depuis les années 1980
Pour comprendre ce que sont les « films transgenres », il faut commencer par définir les notions de « transexualité » et de « transgenréité » : la notion de « sexe » désignera ici les caractéristiques biologiques qui différencient les hommes et les femmes à la naissance, et celle de « genre » renverra aux rôles, comportements, activités et attributs qu’une société considère comme appropriés pour les hommes et les femmes [1]. « Transgenre » est synonyme de « transidentité » qui réfère à la discordance entre le sexe biologique assigné à la naissance et l’identité de genre. Par extension, la récente notion de « cisgenre » est parfois utilisée pour définir la situation de concordance entre les deux.
Début des années 90 : le cinéma s’intéresse à la transidentité
La diffusion de films transgenres en France a évolué conjointement à la considération de la transidentité dans la société. En effet, la création de festivals et de prix dédiés à la question de la transidentité a accéléré le processus de son acceptation artistique en lui offrant un écrin de diffusion dans le milieu du cinéma.
Chéries-Chéris est de ces festivals qui a vu des personnalités extérieures au monde militant LGBTQ+ telles qu’Arielle Dombasle le soutenir en 2005. Fondé en 1994, il mettait en avant les films gays, lesbiens et bi avant de s’étendre aux films trans, queer et « + »[2]. Il a notamment contribué à la popularité du film « Boys don’t cry » de Kimberley Pierce en le primant en 1999, un an avant son Oscar et son Golden Globe.
L’évolution du cinéma transgenre
En cent ans, les transgenres ne sont apparus qu’avec parcimonie au grand écran, mais y sont tout de même parvenu : de « Madame Charlot » (1914), « C’est ma femme » (1929), « Dr Jekyll et Sister Hyde » (1971), « Madame Doubtfire » (1993), à « The Danish Girl » (2015), les productions cinématographiques ont permis à la transidentité d’apparaitre à l’écran et, a fortiori, dans le domaine public. La diffusion de ces œuvres est plutôt vouée à un public qui se sent concerné, dans un rapport paradoxal entre une volonté d’inclusion et d’exclusion.
Le réalisateur Xavier Dolan est précurseur des volontés de banalisation des thèmes LGBTQ+ au cinéma. En février 2011, il entreprend le tournage de « Laurence Anyways » dans lequel un homme annonce à sa petite amie qu’il veut devenir une femme. Il semblerait que la tendance évolue. En effet, « Girl », qui met en scène une jeune danseuse en transition, a remporté quatre prix au Festival de Cannes en 2018, parmi lesquels la Queer Palm.
Si auparavant les films transgenres étaient destinés aux personnes directement concernées par ce sujet, aujourd’hui, une ouverture au grand public semble s’opérer. En effet, des films traitant des questions d’identité de genre et d’homosexualité rencontrent beaucoup de succès. Toutefois, l’auto-exclusion exercée par le cinéma queer lui-même, en cloisonnant les productions cinématographiques dans des festivals dédiés, et l’exclusion exercée par le public, témoignent du fait que le sujet de la transidentité au cinéma n’est pas encore normalisé. La grande majorité des films dans lesquels un acteur ou une actrice est transgenre font de la transidentité leur sujet principal : l’acceptation des transgenres est encore un enjeu.
[1] Source : Encyclopædia Universalis https://www.universalis.fr/encyclopedie/sexe-et-genre/
[2] Le sigle « + », plus extensif, a été ajouté pour inclure de nouvelles identités et/ou les personnes qui ne se reconnaitraient pas dans celles de l’acronyme « LGBTQ ».